Nous vivons dans un monde instable. Certes, il en a toujours été ainsi
mais les bouleversements que nous constatons depuis une cinquantaine
d'année sur le plan sociétal et religieux montrent plus que jamais une
rupture idéologique par rapport à notre passé. Qui aurait pu imaginer il
y a quelques décennies seulement que des réalités telles que
l'avortement, le mariage entre personnes du même sexe, l'euthanasie et
plus généralement l'abandon de notre héritage judéo-chrétien verraient
le jour? Pareil au niveau de l'Eglise. Stable au temps de mon enfance
(je suis né sous Pie XII), celle-ci est devenue aujourd'hui une
organisation de plus en plus confuse et divisée dans laquelle il y a
autant de doctrines et de liturgies qu'il y a de curés. Chaque prêtre
s'habillant comme il veut, disant ce qu'il veut et célébrant comme il
veut, il est normal que les humbles fidèles ne s'y retrouvent plus et
s'en détournent. Déjà désorientés par l'instabilité du monde, ceux qui
espéraient trouver un socle dans la foi catholique en sont pour leurs
frais en constatant combien celle-ci est gagnée par le relativisme.
Décourageant et critiquant ceux qu'elle appelle "rigides",
"conservateurs" ou "identitaires" tout en ne cessant de courir derrière
le monde, l'Eglise finit tellement par lui ressembler qu'on peut
légitimement se demander quelles sont encore ses raisons d'exister. Si
elle n'est plus sur terre pour nous parler du ciel, pour nous aider à
nous préparer à l'éternité, si tout ce qu'elle a à dire tourne autour
d'un "vivre ensemble" ici-bas, autant se contenter de s'engager dans des
ASBL ou des projets humanitaires qui sont d'ailleurs bien utiles. Pas
besoin d'être catholique pour cela. Bref, si le pape, les évêques et les
prêtres estiment que leur institution s'est trompée durant 2000 ans,
qu'elle nous a raconté des bobards jusqu'à Vatican II et que la
Tradition doit être jetée aux oubliettes, qu'ils nous le disent
clairement et ouvertement. Hélas, la franchise et la transparence
n'étant pas des qualités premières en ce milieu, l'ambiguïté continuera
sans doute à nourrir l'instabilité qui caractérise un navire désormais
sans gouvernail.